Le TDAH

Consensus International sur le TDAH Consortium de 75 scientifiques internationaux

ÉNONCÉ DE CONSENSUS INTERNATIONAL SUR LE TDAH

Nous, les membres soussignés du consortium scientifique international, voulons exprimer notre grande préoccupation concernant des informations anecdotiques et fausses qui sont diffusées de façon répétée par les médias relativement au Trouble Déficit de l’Attention/Hyperactivité (TDAH)

II s’agit d’un trouble pour lequel nous avons tous une expertise reconnue et auquel plusieurs d’entre nous ont consacré des recherches scientifiques et, pour certains, leur carrière. Nous craignons que les informations fausses concernant le TDAH qualifiant ce trouble de mythe, de fraude ou de difficulté bénigne, aient pour effet que certaines des personnes touchées ne recourent pas à un traitement approprié à leur condition. De plus, ces affirmations donnent l’impression au public en général que ce trouble n’est pas réel ou qu’il constitue une difficulté mineure.

Nous avons rédigé ce consensus sur le TDAH afin de faire ressortir la valeur scientifique de ce trouble, sa validité et ses effets négatifs sur la vie de ceux qui en souffrent et ce, en date de janvier 2002, date de rédaction de ce texte.

II arrive que les médias présentent des débats entourant ce trouble dans une forme s’apparentant davantage à la compétition sportive qu’à un vrai débat scientifique. Ils confrontent alors l’opinion de scientifiques à des intervenants ou professionnels non experts, donnant ainsi la fausse impression de thèses d’égale valeur. Ce présumé équilibre dans l’information laisse l’impression au public qu’il y a encore des dissensions entre chercheurs à propos de la reconnaissance du TDAH comme problème de santé réel. Dans les faits, ce débat et ces divergences n’existent pas, du moins pas plus qu’il en existe, par exemple, autour de la question du danger pour la santé entourant l’usage du tabac ou du fait que le SIDA soit cause par un virus.

Le « Surgeon General » des États-Unis, 1’« American Medical Association » (AMA), 1’« American Psychiatric Association », 1’« American Academy of Child and Adolescent Psychiatry » (AACAP), 1’« American Psychological Association » et l’ « American Academy of Pediatrics » (AAP), notamment, considèrent tous le TDAH comme un trouble réel. (Au Québec, nous pourrions ajouter le Collège des Médecins et l’Ordre des Psychologues du Québec). Bien que déjà certains de ces organismes aient publié des lignes directrices concernant le diagnostic et l’intervention pour guider les actes de leurs membres auprès de la clientèle TDAH, il s’agit ici du premier consensus émis par un consortium indépendant de leaders issus de la communauté scientifique concernant ce trouble. Nous affirmons qu’il n’existe aucune controverse ou divergence d’opinion parmi les scientifiques qui se sont joints à ce consortium en ce qui a trait à la réalité de ce trouble.

Le TDAH et les connaissances scientifiques

II est faux de prétendre que, scientifiquement parlant, le TDAH n’existe pas. Tous les regroupements, associations médicales et agences de santé publique reconnaissent formellement le TDAH comme étant un trouble, en raison de l’abondance des données scientifiques.
On a recours à plusieurs méthodes pour déterminer si un trouble constitue réellement un diagnostic médical ou psychologique valide. Une de celles-ci stipule qu’on dispose de données scientifiques validées qui démontrent que ceux qui souffrent de ce trouble sont confrontés à des déficiences fonctionnelles sérieuses ou à des limitations dans l’exercice d’actes physiques ou psychologiques propres à tous les humains, c’est-à-dire des actes que toute personne, indépendamment de sa culture, devrait normalement être en mesure de poser.
II faut aussi des preuves scientifiques incontournables pour démontrer que ce déficit a, pour celui qui en souffre, des conséquences nuisibles qui se mesurent en termes de mortalité ou de morbidité accrues, ou de condition handicapant l’exercice d’activités normalement attendues à leur âge. Ces activités concernent des dimensions importantes de la vie, comme l’éducation, les relations sociales, le fonctionnement familial, l’indépendance, l’autonomie et toutes les occupations normalement attendues d’une personne de cet âge.

Pour les signataires de ce document, il ne subsiste aucun doute que le TDAH apporte des conséquences négatives dans plusieurs habiletés psychologiques et qu’elles causent un préjudice important à la plupart de ceux qui en sont atteints. Les résultats de centaines d’études et de recherches scientifiques démontrent que le noyau de ce trouble est constitué de déficits dans l’inhibition de comportements et dans l’attention soutenue. II ne fait aucun doute que le TDAH cause à l’individu des impacts négatifs dans ses activités de tous les jours, notamment dans ses relations sociales, sa réussite scolaire, son fonctionnement familial, son fonctionnement au travail, son autonomie et le respect des règles sociales, des normes et des lois. II est aussi prouvé que les personnes présentant le TDAH ont plus de blessures et d’accidents et qu’ils sont plus souvent victimes d’empoisonnement. C’est pour ces raisons qu’aucune organisation professionnelle de médecins, de psychologues ou de scientifiques ne remet en doute la légitimité du TDAH comme trouble réel.

De nombreuses recherches faisant appel à des méthodes scientifiques diversifiées permettent maintenant de localiser les déficits psychologiques à la base du TDAH dans des régions du cerveau (le lobe frontal, ses connections avec les noyaux gris centraux et leurs relations avec le cervelet). La plupart des études neurologiques démontrent que, dans l’ensemble, les individus présentant le TDAH ont une activité neuro-electrique moindre et démontrent une moins grande capacité de réaction dans une ou plusieurs de ces régions du cortex. Les études en imagerie du cerveau portant sur des individus présentant le TDAH ont aussi fait la preuve que ces régions du cerveau sont relativement plus petites et ont une activité métabolique moindre que chez les individus des groupes contrôle.

Ces déficits dans l’inhibition et l’attention ont été trouvés dans plusieurs recherches faites auprès de jumeaux et de jumeaux fraternels et ce, dans différents pays (États-Unis, Grande-Bretagne, Norvège, Australie, etc.). L’ampleur de la composante génétique associée au TDAH est parmi les plus élevées des troubles psychiatriques (70 % à 95 %), et est comparable à celle associée à la taille de l’individu. Récemment, un gène a pu être associe a ce trouble et plus de 12 équipes différentes travaillent actuellement à identifier plus précisément le ou les liens génétiques. Plusieurs études faites auprès de jumeaux ont démontré que l’environnement familial n’est pas la cause première de ce trouble. Ceci ne signifie pas que l’environnement familial, les habiletés parentales, le stress ou la fréquentation de pairs indésirables n’ont pas d’effets sur le comportement des personnes présentant le TDAH. Les prédispositions génétiques se manifestent toujours en interaction avec l’environnement. Les personnes présentant le TDAH présentent souvent d’autres troubles que l’on dit associés, certains pouvant être directement associés à leur environnement social. Il est cependant clair que les déficits psychologiques associés au TDAH ne sont certainement pas d’abord attribuables à des facteurs environnementaux. C’est pourquoi les scientifiques de réputation internationale, dont font partie les signataires de ce texte, considèrent les contributions neurologique et génétique à ce trouble comme étant prouvées. Ces preuves, appuyées par d’innombrables études qui en montrent à la fois les effets néfastes sur l’individu et l’efficacité de la médication, nous portent à croire que la plupart de ceux qui en sont atteints profiteraient de traitement faisant appel à des stratégies de thérapie à plusieurs volets. Ces thérapies ajoutent à la médication des interventions à l’école, à la famille et dans d’autres situations sociales. Notre position s’inscrit en faux contre les points de vue faussement scientifiques véhiculés dans la presse populaire qui laissent croire que le TDAH n’existe pas vraiment, que la médication de ceux qui en sont affectés est douteuse ou même répréhensible et que les problèmes associés au TDAH ne sont que le reflet de problèmes sociaux comme des difficultés familiales, un temps trop long devant la télévision ou des jeux vidéos, un manque d’amour ou d’attention ou encore l’intolérance des écoles.

Le TDAH n’est pas un trouble bénin. Pour ceux qui en sont atteints, les conséquences peuvent être dévastatrices. Les études à long terme montrent que les personnes atteintes, par rapport à des groupes contrôles, abandonnent davantage l’école (32% contre 40 %), accèdent moins aux études supérieures (5% contre 10 %), ont peu ou pas d’amis (50 % contre 70 %), donnent un sous rendement au travail (70 % contre 90 %), commettent plus d’actes antisociaux (40 % contre 50 %) et font plus usage de tabac ou de drogues illicites. De plus, les jeunes qui grandissent avec le TDAH ont davantage de grossesses précoces (40 %), sont plus infectés de maladies transmises sexuellement (16 %), ont plus d’accidents de voiture et conduisent plus rapidement, sont plus vulnérables à la dépression (20% contre 30 %) et aux troubles de la personnalité (18% contre 25 %) l’âge adulte.

Ils sont de plus affectés par des centaines d’autres inconvénients ou mettent leur vie en danger. Malgré ces graves conséquences, plusieurs études indiquent que moins de la moitié de ceux qui présentent le trouble reçoivent un traitement. Les médias pourraient grandement contribuer à améliorer cette situation. Ils peuvent le faire en présentant le TDAH et les connaissances scientifiques qui l’entourent de façon juste et responsable, tout en évitant de supporter et de diffuser la propagande véhiculée tant par de supposés spécialistes pour qui l’agenda politique voudrait laisser croire que le TDAH n’existe pas. Faire croire que le TDAH est un trouble fictif ou qu’il ne s’agit que de vitalité d’enfants qui effraie les adultes est de la même nature que de déclarer que la terre est plate, que les lois de la gravitation sont douteuses ou que le tableau périodique des éléments est une fumisterie. Le TDAH doit être présenté par les médias de la façon la plus proche possible de la réalité et avec la même rigueur que le fait l’approche scientifique c’est-à-dire comme un trouble réel, ayant des conséquences négatives importantes pour ceux qui en sont atteints, sans que l’on puisse les en blâmer, ni eux, ni leurs parents, ni leurs enseignants.

En toute sincérité

Cet annonce doit paraître dans Clinical Child and Family Psychology Review, Juin 2002. publié par Kluner Academic/Plenum Publishing Co.

86 noms de chercheurs bien connus et respectés suivent :

Russell A. Barkley, Ph.D. - University of Massachusetts Medical School ; Edwin H. Cook, Jr., M.D.- University of Chicago ; Mina Dulcan, M.D. - Children’s Memorial Hospital- Chicago ; Susan Campbell, Ph.D. - University of Pittsburgh ; Margot Prior, Ph.D. - Royal Children’s Hospital-Australia ; Marc Atkins, Ph.D.- University ofl1linois at Chicago ; Christopher Gillberg, M.D. - University of Gothenburg ; Mary Solanto-Gardner, Ph.D. - The Mt.Sinai Medical Center- New York ; Jeffrey Halperin, Ph.D. - Queens College, CONY ; Jose J. Bauerrneister, Ph.D. - University of Puerto Rico ; Steven R. Pliszka, M.D., University of Texas Health Sciences Center ; Mark A. Stein, Ph.D. - George Washington Univ. Med. School ; John S. Werry, M.D. -University of Aukland ; Joseph Sergeant, Ph.D. - Free University ; Ronald T. Brown, Ph.D. - Medical University of South Carolina ; Alan Zametkin, M.D. - Child Psychiatrist -Kensington, MDArthur D. Anastopoulos, Ph.D. - University of North Carolina at Greensboro ; James J. McGough, M.D. - UCLA School of Medicine -Los Angeles ; George J. Dupaul, Ph.D. - Lehigh University -Bethlehem ; Stephen V. Faraone, P .h.D. - Harvard University ; Florence Levy, M.D. - University of New South Wales ; Mariellen Fischer, Ph.D. - Medical College of Wisconsin ; Joseph Biederman, M.D. - Massachusetts General Hospital and Harvard Medical School ; Cynthia Hartung, Ph.D. - Oklahoma State University ; Stephen Houghton, Ph.D. - University of Western Australia ; Gabrielle Carlson, M.D. - State University of New York at Stony Brook ; Charlotte Johnston, Ph.D. - University of British Columbia ; Thomas Spencer, M.D. - Harvard Medical School and Massachusetts General Hospital ; Thomas Joiner, Ph.D. - Florida State University ; Rosemary Tannock, Ph.D. - Hospital for Sick Children -Toronto ; Adele Diamond, Ph.D. - University of Massachusetts Medical School ; Carol Whalen, Ph.D. - University of California at Irvine ; Stephen P. Hinshaw, Ph.D. - University of California at Berkeley ; Herbert Quay, Ph.D. - University of Miami ; John Piacentini, Ph.D. - UCLA Neuropsychiatric Institute ; Philip Firestone, Ph.D. - University of Ottawa ; Salvatore Mannuzza, M.D. - New York University School of Medicine ; Howard Abikoff, Ph.D. -NYU School of Medicine ; Keith McBurnett, Ph.D. -University of California at San Francisco ; Linda Pfiffner, Ph.D. - University of California at San Francisco ; Oscar Bukstein, M.D. -Western Psychiatric Institute and Clinic -Pittsburgh ; Ken C. Winters, Ph.D. -University of Minnesota ; Michelle DeKlyen, Ph.D. - Princeton University ; Lily Hechtman M.D. F.R.C.P. -Mc Gill University and Montreal Childrens Hospital ; Caryn Carlson, Ph.D. - University of Texas at Austin ; Donald R. Lynam, Ph.D. - University of Kentucky ; Patrick H. Tolan, Ph.D. - University of Illinois at Chicago ; Jan Loney, Ph.D. - State University of New York at Stony Brook ; Harold S. Koplewicz, M.D. - NYU Child Study Center ; Richard Milich, Ph.D. - University of Kentucky Laurence Greenhill, M.D. - Columbia UniversityEric J. Mash, Ph.D. - University of Calgary ; Russell Schachar, M.D. - Hopital for Sick Children ; Eric Taylor - Institute of Psychiatry -London ; Betsy Hoza, Ph.D. - Perdue University ; Mark D. Rapport, Ph.D. - CHADD -Landover

P.-S.

Clinical Child and Family Psychology Review, Vol. 5, No. 2, June 2002 ( C° 2002)
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